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Les pieds, endoloris à force de marcher sur les galets, arrêtèrent enfin leur périple pour venir caresser la serviette de plage.

Le soleil, en ce mois d'août, se couche de plus en plus tôt mais garde son énergie lumineuse au service de nos désagréments épidermiques.

Je viens de terminer le livre que ce cher Didier m'avait conseillé, "La réconciliation".

La dernière page du livre, qui venait sceller une amitié et clôturer une guerre fratricide coïncidait avec la fin de la partie qui s'étaient engagée entre Adrien et son petit frère, Rémi.

- Papa, on rentre ?

- Oui, Adrien, ranges tes affaires et prends les clés de la voiture.

Il était suffisamment grand maintenant pour ouvrir le coffre et ranger consciencieusement les raquettes, la balle et les draps de bains.

- J'appelle vite fait ton grand-père et nous repartons.

Je composai le numéro du paternel comme tous les soirs, pour prendre de ses nouvelles.

- Allô, Antoine ? C'est Marc. Pourriez-vous me passer mon père ? Merci.

S'en suivit une conversation des plus banales : la santé, les enfants, le temps.

- Au fait, fils, j'ai quelque chose d'important à te dire. A la télévision, aux informations, ils ont annoncé qu'une femme avait été trouvée errant dans une rue de New York. 

- Tu veux dire, une vraie femme ? Pas un de ses travestis ?

- Oui, une vraie. Comme ta mère.

Je me souvenais bien de ma mère. Ceux qui s'en souviennent ont eu une chance inouïe ; ils connaissent ce que ressentent les femmes. Eux-mêmes se découvrent des sentiments qui ne sont ni du domaine de la satisfaction professionnel, ni de la réussite sportive. La domination laisse place à l'émotion.

- Fils, c'est peut-être un signe. Certes, pas très vigousse mais si elle est là, alors sans doute que d'autres suivront. J'ai grand espoir, fils. Bon, je te laisses, c'est ma toilette. A bientôt et fais un bisou aux enfants de ma part.

Il était 18 heures 23 ; le soleil semblait refuser de perdre de sa vigueur et de sa superbe et lâchait ses dernières forces photoniques, aux couleurs orange et rouge.

Je pris place au volant et me retourna vers les enfants.

- Papa, on vient de voir passer un tap-tap, comme celui qu'on a vu l'an dernier.

- Tu es sûr ?

- Oui, certain, et il était coloré comme là-bas. C'est un signe ?

- Je ne sais pas, Adrien, sans doute. Mais méfies-toi, les signes sont parfois trompeurs. On croit avoir vu quelque chose et en fait, c'est notre esprit que nous joue des tours.

- Je sais, mais là, j'en suis sûr et certain.  

- Bon, d'accord, je veux bien te croire. 

Je me retournais pour tourner la clé et faire démarrer le moteur. Je regardais dans le rétroviseur. J'enviais son innocence et sa détermination. Il tenait ça de son grand-père. 

Je m'aggripais avec force au volant, tentant de surpasser le flot d'émotions qui m'assaillaient.

- Allez, en route, mauvaise troupe ! dis-je pour me donner du courage.

- Dis, papa, tu sais si on la reverra, un jour ?

- Qui ? Maman ?

- Oui.

- Je ne sais pas, Adrien. Tu n'oublieras pas tes devoirs en rentrant.

Nous quittâmes la plage alors que la nuit commençait à tomber, éteignant les dernières lueurs du soleil.

 

 

 

L.P.

Une lueur d'espoir

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