top of page

Tout feu , tout femme

La toile était tendue sur le mur en pierre. Isabelle, fraîchement couronnée reine de la terre du Crépuscule, s'avança et scruta les moindre centimètre carré de la fresque qu'elle avait commandée pour son intronisation.

Elle passa une heure seule dans l'immense salon. Il abritait notamment une collection de papillons, sans doute la plus importante au monde. Des animaux naturalisés venaient parfaire la décoration. 

Elle entendit la porte s'entr'ouvrir ; le visage d'Annabelle fit son apparition.

- Mademoiselle votre Altesse, les invités ne vont pas tarder à arriver.

- Bien, Annabelle. Et si vous pouviez cesser de m'appeler par ce sobriquet , je serais plus heureuse.

- Je ferais de mon mieux pour vous satisfaire, Isabelle.

Les deux jeunes femmes prirent la direction de la salle à manger, là où trônait une table pouvant accueillir 30 invités.

Deux jeunes femmes trentenaires arrivèrent les premières. Elles étaient chargées de surveiller le bon déroulement de la réception.

- Les dispositifs de sécurité ont été activés, votre Altesse.

- N'avais-je point dit de ne justement pas les activer ?

- Si, votre Altesse, mais ce sont les procédures applicables dans tout le palais. Votre père les a mis en place juste avant de partir.

- Et vous allez me faire le plaisir de les désactiver. Ce sacré gars a cassé sa pipe et je suis la nouvelle reine. Par conséquent, mes exigences s'appliquent en lieu et place de celles de feu mon père.

- Bien, votre Altesse.

Les minutes défilaient, tout comme les invités. Robes, hauts talons, et cheveux en chignons prirent position près des candélabres chargés de flammes de toutes les couleurs.

La jeune reine les enjoignit à prendre place autour de la table et à s'asseoir.

- Mes chères demoiselles, votre présence ce soir n'est pas due à votre beauté ou à votre jeunesse.

Si je vous ai fait venir ici, c'est pour constituer le gouvernement de la nouvelle République du Crépuscule. Une petite étincelle brillait dans les yeux de la jeune femme. 

Les questions fusèrent dans l'assistance. Chacune d'entre elles eurent les réponses à leurs questions.

Une jeune femme, à la peau métissée, leva son verre de champagne.

- Chère reine, chères demoiselles, je souhaite lever mon verre à nous toutes. Une nouvelle page de notre pays s'écrit et l'Histoire est à jamais changée.

- Merci beaucoup. Pour vous remercier d'avoir accepté mon invitation, je vous invite dans le salon.

La reine les fit pénétrer dans le salon et furent saisie d'effroi à la vue de la toile.

Elle représentait l'incendie du château de l'Aube, et ses centaines de cadavres pris dans le brasier.

- Quelle horreur, hurla une jeune femme rousse. Pourquoi avez-vous fait représenter le plus sanglant de notre pays ?

- C'est une bonne question, Jésabelle. Il s'agit en fait d'un artifice. Celle qui a l'Ame ne verra pas le sang et les pleurs, mais l'espoir et la santé.

C'est alors que toutes les jeunes femmes furent conduites par la chargée de sécurité à l'étage.

Depuis ce temps, on entendit plus jamais parler des jeunes femmes qui avaient été au repas de la Reine.

L.P.

Ancre 23092017

Le soir venait à point nommé. Les vers de terre finissaient de s'enfouir dans la terre humide et noir de la forêt et les derniers loups se mirent en quête d'un abri.

Renaud les observait depuis la butte de craie. Un tas de feuilles mortes le recouvrait de la tête au pieds, afin de passer le plus discrètement possible dans le décor.

Les heures s'égrenaient et les loups avaient disparus. Il était 4 heures du matin et devaient maintenant apparaître les animaux qu'il avait vus en rêve pendant une semaine.

- Alors ? Toujours rien ? Terminé, demanda son ami Serge.

- Rien. Mais je ne désespère pas, le jour ne se lève que dans 2h30. Terminé.

Le regard qu'avait eu Serge le jour où il lui demanda de l'emmener dans la forêt était le plus intriguant qu'il avait jamais eu.

- Et tout ça, parce qu'un rêve te demande de cartographier la forêt et d'y trouver la zone B8. Est qui a-t-il d'intéressant dans cette zone ?

- La vérité, Serge.

Serge, par chance, connaissait bien cette forêt. Et pour cause : il y travaillait comme garde forestier.

Le hasard fait vraiment bien les choses.

Renaud prit sa lampe torche et balaya la zone indiquée sur la carte. Il en était pourtant sûr, la vérité était bien là.

Un bruit se fit entendre, suivi d'un scintillement régulier. Les lumières dansèrent les unes après les autres puis toutes ensemble et, après quelques minutes de ce ballet, arrivèrent en ligne et demeurèrent figées.

Le soleil n'allait pourtant pas tarder à se lever et à venir clôturer ce spectacle.

- Serge, elles sont là. Je n'avais pas menti. Terminé.

Renaud zooma le plus possible pour saisir ce moment. Il se rappelait de leur forme, des mandibules, des ailes, des membres qu'il avait vu sur une gravure, identique aux formes qu'il avait vu en rêve.

L'espèce était éteinte depuis 1820, quand les colons ont envahi l'immense forêt martienne.

Les journaux scientifiques étaient pourtant formels : il est impossible de trouver le moindre individu dans la forêt.

Renaud était sur le point de prouver le contraire. Ces rêves n'étaient des calligraphies cérébrales, mais des prémonitions.

Serge le rappela et lui demande des détails sur ces formes lumineuses.

- Elles sont comme dans les gravures, elles sont réelles. Elles sont en groupe, comme dans mes rêves. Je te supporte plus de rester ici à les observer. Je veux les toucher, le prendre dans mes mains.J'y vais. Terminé.

Renaud se leva, laissant tomber l'émetteur-récepteur au sol. Animé par sa soif de découverte et de gloire, il courut vers le troupeau de lumière. 

Mais chacune d'entre elles s'élevèrent dans les airs et se mirent à briller de plus en plus intensément, au point d'éblouir Renaud.

Ses pieds se prirent dans une racine d'arbre et roula jusqu'au bord de la rivière qui le séparait de ces êtres tombés dans l'oubli.

La lumière s'éteignit d'un seul coup, mais Renaud dû attendre quelques secondes avant de rouvrir les yeux. 

C'est à ce moment qu'il vit l'inimaginable : une vingtaine de ces bêtes les mandibules immenses, laissant couler une bave jaunâtre, et claquant comme des cisailles.

Il n'eut pas le temps d'émettre le moindre son qu'elles entreprirent de le croquer. Sa tête fut la première à quitter le corps de Renaud.

- Renaud, tu les as vu maintenant ? Renaud ? Renaud ?? 

L.P.

La bête martienne

Ancre 08102017
bottom of page