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Je pris le livre sur la pointe des pieds, et j'en fis tomber un autre, bien plus fin. Une fois à ma place dans l'immense bibliothèque universitaire, je posais les deux livres.

Je commençais à lire la première page du livre pour lequel j'étais venu spécialement de Marseille Sud quand ma concentration et mon regard ne pouvait s'empêcher de tendre vers ce petit livre, à la couverture souple, sur laquelle le titre était écrit en lettres gothiques.

Peu d'informations : le dos du livre n'indiquait aucun résumé ni aucune photographie de l'écrivain.

Je pris le stylo électronique et scanna le titre pour tenter de le décrypter. 

L'ordinateur fit une analyse du titre, qui s'afficha sous la forme d'une barre de progression. Arrivée à 100 %, un message rouge s'afficha : Analyse impossible. Envoi à l'ordinateur-maître.

A peine le message était apparut qu'un brusque bruit de chaise se fit entendre. Il provenait du bureau d'accueil de la bibliothèque qui se trouvait derrière une porte vitrée.

Une jeune femme ouvrit la porte et se dirigea vers moi, claquant ses talons sur la moquette épaisse.

- Qu'est-ce que vous venez de faire ? Il ne faut jamais demander d'informations à l'ordinateur-maître, c'est interdit dans le règlement intérieur de la bibliothèque.

Elle se pencha vers moi ; je sentis son odeur corporelle délicatement fruitée et le frottement de son fidèle gilet sur mon épaule.

- Ce n'est pas moi, c'est l'ordinateur, balbutiais-je

- Laissez-moi votre place, je dois interrompre tout de suite l'analyse.

Son énergie fit virevolter mes feuilles et son odeur me parvint si fortement aux narines que je pris une bouffée d'air par la bouche.

Ses doigts fins et ses ongles vernis de rouge gambadaient furieusement sur les touches du clavier comme des pattes d'écrevisse.

- Vous êtes complètement dingo, mademoiselle. 

- Vous devriez plutôt me remercier, jeune homme. L'ordinateur-maître ne supporte pas qu'on l'interrompe pour des demandes futiles. C'est pour ce livre que vous faites une demande de renseignement ? dit-elle en désignant le livre que je venais de scanner.

- Oui, mais vous devriez regarder l'écran, quelque chose semble se réactiver.

La jeune femme se tourna et vit l'impensable : la demande d'information fut relancée à l'ordinateur-maître sans qu'elle est manipulé quoique ce soit.

- C'est juste incompréhensible. Je dois appeler le directeur. Ne bougez pas.

Elle fit un bond et courut vers son bureau. Ses jambes fines et musclées cisaillaient avec grâce.

Deux minutes plus tard, des claquements lents résonnèrent dans la bibliothèque. L'homme s'approcha de la jeune femme. Après lui avoir tendu le livre que j'avais scanné, je vis l'homme le dissimuler dans un porte-documents.

La porte s'ouvrit ; son allure d'étudiant contrastait avec sa voix assurée et grave.

- C'est vous qui avait scanné ce livre ?

- Oui, c'est bien moi.

- Parfait. J'étais un grand joueur de jeu d'arcade dans ma jeunesse et je connaissais un jeu qui s'appelait "Le Traineau de l'Enfer". Si je vous raconte cette anecdote, c'est que vous allez devoir interroger l'ordinateur-maître pour qu'il vous donne le nom du titre du livre.

- Et pourquoi moi ?

- Car vous êtes le premier, après moi, à avoir trouvé ce livre et à l'avoir scanné. Mais je n'ai jamais su son titre car il était interdit de contacter l'ordinateur-maître.

Ma curiosité m'a poussé à m'intéresser aux relations entre l'Homme et la machine et, pendant mes études en informatique, j'ai réalisé des recherches sur la transmission des ondes cérébrales sur un serveur informatique. J'ai réussi à contrôler pendant quelques secondes l'ordinateur-maître via un casque que j'ai inventé qui convertit les ondes cérébrales alpha et beta en code assembleur. 

- Et mon rôle dans tout ça ?

- Vous allez être miniaturisé et numérisé. Je vous donnerez des ordres via ce casque et vous les exécuterez comme le ferait un programme informatique. Vous serez mon "corniaud", une sorte d'hybride entre des pensées humaines et code informatique.

-  Je pourrais donc dialoguer avec vous et avec l'ordinateur central ?

- C'est exact. Je vous piloterais par mon casque.

L'homme me conduisit dans son bureau, qui se trouvait de l'autre côté du couloir, face à l'accueil.

La jeune femme, qui nous avait accompagnés, eut un regard affectueux sur moi et vient poser un baiser sur le coin de ma bouche.

- Monsieur m'a raconté ce qu'il lui était arrivé avec l'ordinateur-maître. Vous allez devenir un héros !

L.P.

Parenthèse fermante

Ancre 26012017

Un bref regard et l'oiseau s'envola. Le petit garçon se mit à courir en direction du volatile qui cherchait quelque nourriture à se mettre sous le bec.

Les pieds du garçon arrivèrent à portée de son regard mais l'oiseau ne voulut pas bouger. Il en avait assez de cette danse interminable, que son instinct lui ordonnait systématiquement d'exécuter.

Sa tête se leva en direction de l'humain. Son port de tête était majestueux ; ses couleurs vives couvraient tout son corps.

Soudain, le garçon se pencha vers lui. La panique s'empara de l'oiseau qui n'avait jamais vu quelqu'un d'aussi près.

- Que faire ? Partir ou rester ? 

L'instinct de survie était encore bien présent mais une espèce de force insistait pour le laisser sur place, comme une curiosité mais plus consciente.

- Salut ! expulsa d'un coup le petit garçon. Lui aussi sentait qu'une puissance secondaire voulait s'opposer à son désir d'amusement, comme un basculement inéluctable et indispensable.

Les deux êtres se regardèrent, sans arrière pensées. L'oiseau tourna brusquement sa tête de manière à apprécier du mieux possible les intentions du jeune garçon. L'humain portait une crinière de plumes peu conventionnelle et, tandis qu'il finalisait son observation minutieuse, un voile noir vint se poser devant lui. Lorsque la lumière revint, il n'était plus dans le parc.

Tout était gris, et des spirales tourbillonnaient autour de lui.

Une des spirales pris la forme d'un de ses congénères.

- Je suis le roi de ton esprit, être. Ton regard s'est posé sur un ennemi sans qu'un ordre te soit donné. 

- Je vous demande pardon, cher roi. Quelque chose me perturbe mais je sens que c'est nécessaire.

- Nécessaire ? Tu es bien le premier à qui cela arrive. 

- Je sais bien, cher roi. Et je dois aller jusqu'au bout, c'est ce que me dicte cette force.

- As-tu oublié à ce point d'où tu viens ? Nos ennemis nous obligent à partir en Afrique chaque année et toi, tu les laisses te manipuler ton esprit ?

- Cette force n'est pas humaine, je le sens. 

Pendant ce temps, un bras de nuage sonda l'esprit de l'oiseau. Il rejoignit le corps du roi.

- Ton esprit est possédé d'une force humaine et lentement, te transforme. Si tu ne fais rien, tu risque de ne pas en sortir vivant.  L'humain est dominant par nature et te voudra du mal. Est-ce cela que tu souhaites ?

- Non, bien sûr. Mais le libre arbitre me dicte que c'est bien et j'en suis convaincu. Laissez-moi intégrer cette force.

L'oiseau ne semblait plus loyal envers son roi. Les spirales grises disparurent et firent place au décor tel qu'il l'avait laissé quelques secondes auparavant. 

Le jeune garçon avait le visage près de sa tête. Cette même force contrôlait maintenant tout son corps et lui demanda de s'avancer.

Le jeune garçon, mu de la même force , tendit une main sur le sol. L'oiseau sentit l'air sur lui à une vitesse peu commune et pu à présent voir les nuages gris et le sol vert. 

L.P. 

L'enfant et l'oiseau

Ancre 02022017
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