top of page

L'oiseau   noir dans la neige blanche

Perdu dans ses pensées, Alfred Polnareff laissa le canon à neige artificielle en marche, alors qu'il était temps pour lui de rentrer.

Vingt heures pétantes, lui avait dit sa femme. Mais il était déjà en retard.

Il leva les yeux vers les cîmes ; son regard balayait les divers sommets, couverts de ses coulées de blanc, qu'on croirait éternellement accrochés à la roche.

Il chaussa ses skis, se saisit des deux bâtons et commença sa longue descente. Il slalomait de temps en temps pour éviter, tantôt les troncs d'arbres, tantôt des pierres.

Arrivé en bas de la piste, le long d'une rangée de barrière en sapin, son regard fut attiré par une tâche rouge. Elle diffusait dans la pureté de la neige.

En s'approchant de cette tache, il vit un tout petit oiseau, les yeux fermés. Ses ailes, ou ce qui en restait, étaient couvertes de sang.

Tout en l'observant, Alfred planta ses bâtons et déchaussa ses skis. Un grincement se fit entendre puis une voix tremblante et faible lui parvint.

- Ne le touchez pas, ou il arrivera un grand malheur.

Alfred n'en avait cure et s'agenouilla devant la dépouille de la petite bête. Il la prit dans ses mains précautionneusement. 

Soudain, l'oiseau se mit à pourrir puis à s'effriter comme du sable. Très vite, il ne restait plus rien de l'animal.

Il ne va pas sans dire que, depuis ce moment-là, le village de Fiscal vit dans le chaos. Mais cet évènement, personne ne s'en souvient, si ce n'est Alfred.

L.P. 

 

Ancre 23102017

De cette histoire, personne n'en est revenu vivant. On peut même dire qu'une fois que vous avez lu ces premiers mots, n'espérez pas échapper à la mort. Jetez également un oeil autour de vous : chaque personne, chaque animal à votre portée va mourir dans l'heure qui va suivre la fin de la lecture.

Et n'essayez pas de vous défilez : vous êtes condamné à lire cette histoire, sinon vous mourrez instantanément.

Il y a trois cent ans, dans un camp indien de l'Oregon, une jeune femme, qui venait de s'endormir dans les bras d'un jeune soldat américain blanc, fut réveillée par un hurlement de loup.

Elle se leva, et sortit du tipi. Elle remarqua que l'enceinte de sapin qui clôturait la cité était brisée; une brêche de plusieurs mètres de long avait été pratiquée, laissant pendre des morceaux.

Elle retourna dans le tipi et réveilla son amant. Elle était apeurée et le supplia de trouver le responsable de cette dégradation. 

Fatigué, il lui fit comprendre qu'il souhaitait dormir. Mais à peine étaient-ils endormis qu' à nouveau, un long hurlement de loup se fit entendre.

Cette complainte, peu habituelle, fit une seconde fois se réveiller la jeune femme.

Cette fois-ci, elle alla chercher de l'aide auprès des gardiens.

- Il faut faire quelque chose ! Ce n'est pas normal, et la barrière est largement ébréchée.

Les deux jeunes gardiens prirent leur fusil et leur hache.

Ils se dirigèrent vers la barrière, et y trouvèrent à présent une tête d'Indien. La jeune femme hurla d'effroi. 

- Il faut attendre le lever du soleil, sinon, on risque de se faire ...

- Tu ne penses tout de même pas qu'il y a des loups mangeurs d'homme ?

Il fallait imaginer le pire. 

- Non, je vous en supplies, allez-y maintenant, plus vite on les trouvera, plus vite nous aurons la paix.

Il prirent la direction de la forêt ; la terre y était fine comme du sable. Il fallait se tenir aux arbres pour grimper sur les pentes escarpées.

Le plus grand des deux jeunes hommes avait pris de l'avance, tandis que le plus jeune restait pour protéger la jeune femme.

Soudain, un hurlement suivi d'un coup de fusil se fit entendre. Puis plus rien. A nouveau, une complainte.

- Mon Dieu, il a dû arriver malheur à Sacajewa ! Va voir, Walowa.

Le jeune homme s'enfonça dans la forêt. Il courit plusieurs centaine de mètres ; mais à mesure qu'il avançait, le sol prenait des teintes brunes, puis rouges, mêlées de noir anthracite. Une odeur de plus en plus forte s'emparait de lui.

Soudain, les arbres disparurent pour laisser place à une immense cour, couverte de cages, de barbelés, et surtout de sang.

Des dizaines de loups, aux babines couvertes d'hémoglobine et de terre, se repaissaient de la chaire humaine. Sur la plupart des cadavres ne restaient que les os et quelques lambeaux de chair.

Il étouffait un cri de panique et se réfugia derrière un arbre.

Il sorti un foulard et le mit sur sa bouche et son nez pour ne pas respirer les odeurs des corps en putréfaction.

Il se retourna et vit un louve meurtrière, qui posait un bras et s'apprêtait à le manger. Il sortit alors son tomahawk et le lança de toutes ses forces sur la louve. Elle vint se planter sur la nuque puissante et fit glicler le sang des artères.

Deux loups se retournèrent et virent le jeune homme courir vers une des cages.

Ils se précipitèrent sur lui, et, de leur gueule encore dégoulinante de sang, le saisir aux pieds.

Le jeune homme fut traîné avec une violence sans pareil, ne sachant rien faire d'autre que d'hurler.

Les loups l'amenèrent vers un groupe de loups, rassemblé autour de ce qui semblait être leur chef, car il était bien plus grand et dont les muscles étaient bien plus forts que ceux des autres.

- Tu as osé t'attaquer à une d'entre nous ? dit le loup au jeune homme.

Ce dernier, surpris par ce loup qui avait le don de la parole, balbutia quelques mots.

- Soit, je ne compris rien mais ce n'est pas grave. Je vois un toi un homme courageux, qui ose affronter ses peurs. En effet, toi seul, depuis notre arrivée loin des hommes, a réussi à t'approcher et à venir nous défier. Tous ceux que tu vois là sont morts de peur.

Le jeune homme repris doucement ses sens.

- Vous avez tué tous les hommes de notre cité ? Vous allez le payer cher ! dit-il en se levant, brandissant sa hache.

Le grand chef loup stoppa son mouvement rien qu'en le regardant droit dans les yeux. Il sortait de ses globes oculaires une lumière rose et chaude.

- Si tu veux vivre, soit des nôtres. Nous ne te ferons aucun mal, ainsi qu'aux autres membres de ta cité. Mais si tu persiste, il ne restera plus rien de cette cité humaine.

Il pensa alors à la jeune femme qu'il avait juré de protéger. 

- Je suis prêt à tout accepter mais comment devenir un des vôtres ? Un humain n'a rien à faire avec des loups sanguinaires ?

- Nous avons emprunté cette forme mais, en réalité, nous sommes comme toi. Depuis des siècles, nous sommes persécutés. Nous vivions auparavant dans le donjon d'un château souterrain. Mais un jour, des humains comme toi nous ont obligé à vivre à l'extérieur car nous étions différents d'eux. Après plusieurs siècles d'errance, nous avons trouvé refuge ici il y a quelques mois, et avons dû nous nourrir de viande humaine.

Toi seul peut nous aider à retrouver la paix et à renoncer à ce bain de sang qui dure depuis ce temps.

Le jeune Walowa réfléchit quelques instants. 

- C'est d'accord, finit-il par annoncer au chef. 

Les loups prirent alors de nouveau forme humaine, firent disparaître les corps mutilés. 

Pendant ce temps, la jeune femme, qui était revenu au camp, s'était à nouveau endormi dans les bras du jeune soldat blanc. Plus aucun hurlement de loup ne vint troubler son sommeil.

Tous les manuels d'histoire populaire vous diront que les centaines d'hommes de la cité et des alentours avaient été infectés par la douve du foie. Maintenant, vous comprenez que ce n'était qu'une légende.

 

L.P.

Les loups  sont dans la bergerie

Ancre 06112017
bottom of page